Chaise évasion / Nathan Lopez Romero

Ma pratique de la peinture se développe surtout à travers des questions relatives à l’espace. Espace du quotidien, de ce que l’on peut voir depuis sa fenêtre, de choses banales et abstraites. Je produis principalement des séries de peintures. Cela me permet de préciser et multiplier le sujet, produire différentes vues, plusieurs possibilités d’un même espace. Une temporalité est induite. Ce sont de longs moments à observer ces espaces, les dessiner en attendant le bouillonnement de l’eau des pâtes, les photographier quand les gyrophares éblouissent la rue. En usant de superpositions et d’imbrications de formes singulières, se dévoilent des temps, des moments qui se distinguent depuis un même lieu. Au cours des derniers mois, j’ai laissé le geste de peindre s’effacer peu à peu pour me permettre de chercher la forme et la couleur ailleurs avec l’utilisation de ce que j’appelle des fragments de peintures.
Quand les pièces s’entreposent dans l’atelier et que la place vient à manquer, j’entreprends des recadrages de certaines toiles : des découpages, des prélèvements d’éléments, des changements d’échelles que je transpose ensuite sous forme d’installations.
Cette manière de produire des pièces en découpant le surplus de ma production s’inscrit plus largement dans une économie de travail qui me permet de le rendre accessible et diffusable. En effet, je considère que les fragments qui composent ces pièces existent aussi indépendamment, c’est-à-dire que l’on peut décomposer l’installation afin de la diffuser en morceaux. Depuis un an, j’ai laissé dans les endroits où je me suis rendu bon nombre de ces fragments.
Je considère la fraction de ces installations passées et futures comme un objet qui s’apparenterait à une dissémination de cartes dans une aire géographique plus large que celle de l’espace d’art, impliquant le questionnement des notions d’échelles et de déplacements relatifs à l’oeuvre et l’espace qu’elle déploie, que je poserai maladroitement par «Où/Qu’est ce qui fait peinture?»